Paris s’éveille au son du canon. Les versaillais, qui trouvent les portes et les remparts déserts, ont su exploiter les faiblesses de la défense. Dans la soirée, la division Douai fait ouvrir les portes de Passy, Auteuil, Saint-Cloud, Sèvres et Versailles. Au matin, ce sont 130 000 soldats qui sont entrés dans Paris. Profitant de la surprise, ils cheminent de nuit, égorgent silencieusement les sentinelles fédérées qu’ils rencontrent, et parviennent à occuper presque sans combats la partie ouest du 15ème et le 16ème arrondissement. Le bataillon des volontaires, qui tente seul de s’opposer à l’assaut, doit se replier vers les Champs-Élysées.

Dès l’aube, autour de 5h du matin, les soldats reprennent leur marche. Longeant les remparts, ils prennent à revers les principales positions fédérées, tournées vers l’extérieur de la ville. Ils parviennent à contourner les fortifications des portes Maillot, Bineau, Courcelles, d’Asnières et de Clichy, des ouvrages sérieux qui n’auront servi en rien à la défense de la grande ville.

Une division de versaillais suit le même chemin de l’extérieur des remparts. Ils surprennent ainsi les fédérés de Neuilly, de Levallois et de St. Ouen, que personne n’a pensé à prévenir, et qui sont contraints d’abandonner leurs positions sous le feu des lignards. Beaucoup de gardes nationaux sont capturés. Ceux qui s’échappent regagnent Paris en rangs dispersés.

Dans la ville insurgée, la résistance s’organise. Toute la nuit, le tocsin à sonné, et l’Hôtel de Ville a fait battre la générale dans tous les quartiers. On barricade les rues, les avenues, les boulevards. Les parisiens s’éveillent et trouvent la ville couverte d’affiches signées Delescluze, délégué à la Guerre, qu’il a fait imprimer dans la nuit. “Le peuple ne connaît rien aux manœuvres savantes, mais quand il a un fusil à la main, du pavé sous les pieds, il ne craint pas tous les stratégistes de l’école monarchiste. Aux armes ! Citoyens, aux armes !”.

Pendant la journée, les combats se concentrent dans l’ouest de la ville. Rive gauche, les versaillais occupent la gare Montparnasse, la porte de Vanves et l ‘École Militaire. Surpris à la Concorde par Brunel et ses hommes, ils subissent de lourdes pertes. Rive droite, ils investissent le palais de l’Élysée, débouchent sur la place Saint-Augustin, et s’installent à la caserne de la Pépinière. Le soir, l’armée de l’Ordre occupe en entier le 15ème et le 16ème arrondissement, et plus de la moitié du 7ème arrondissement au sud, et des 8ème et 17ème arrondissements au nord. La ligne de front part de la gare des Batignolles, et descend jusqu’à la gare Montparnasse.

Barricade de la Place Blanche, défendue par des femmes ( google map )

Derrière la ligne de front, on monte des barricades. Au nord, on fortifie la place Clichy, les carrefours du faubourg Montmartre, de la Trinité, de la rue des Martyrs. Au sud, le boulevard Saint-Michel, le Panthéon, la rue Saint Jacques, les Gobelins et les avenues du XIIIème arrondissement. Place Blanche, une grande barricade est tenue par un bataillon d’une centaine de femmes, dont Louise Michel et Elizabeth Dmitrieff.

Ce soir, les rues envahies ne seront plus éclairées : à l’entrée du faubourg Montmartre, la lumière cessera brusquement. Les fédérés veilleront toute la nuit sur la ligne de front. Dans un Hôtel de Ville en état de siège, et dans la confusion la plus totale, l’état-major tente de recouper les informations, de rassembler ses forces et d’élaborer une stratégie. Les munitions manquent, les revers se multiplient et des rumeurs contradictoires circulent. On signale plusieurs départs de feu dans le quartier du Champ-de-Mars.

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© illustrations: Bibliothèque historique de la ville de Paris, éditions Dittmar, Musée Carnavalet.

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